Traduction du texte par Jules BLOCH, Jean FILLIOZAT, Louis RENOU, publiée en 1949.
NOTE PRÉLIMINAIRE
Les écritures bouddhiques de langue pâli, le canon « en trois corbeilles », le Tipitaka, forment les textes sacrés du bouddhisme aujourd’hui vivant à Ceylan, en Birmanie, au Siam, au Cambodge et au Laos. Elles représentent le seul canon bouddhique conservé dans son ensemble en sa langue indienne originale, alors que les autres n’existent plus que dans une partie de leurs textes primitifs sanskrits ou dans des traductions tibétaines, mongoles ou chinoises. Le Tipitaka, canon de la vieille école bouddhique des Thera (sanskrit Sthavira), c’est-à-dire des « Doyens», a donc le double intérêt d’être l’Ecriture d’une grande religion vivante et le principal
monument du bouddhisme ancien. L’entreprise de sa traduction en français s’impose donc malgré l’étendue redoutable de la tâche qu’elle représente. Cette traduction, commencée ici, a pris pour base le texte de l’édition publiée par l’Institut bouddhique du Cambodge à Phnom-Penh, en caractères cambodgiens (mul), avec traduction cambodgienne en regard. Le texte présenté ici en face de la traduction française est la transcription de l’édition cambodgienne. Cette édition a été établie d’après la tradition manuscrite du Cambodge confrontée avec les éditions de la Pali Text Society et de Birmanie. Les variantes données en notes par l’édition cambodgienne sont précédées du sigle 0 quand elles se rapportent aux leçons adoptées dans le texte de la Pali Text Society (oropiyapotthaka) et du sigle Ma quand elles visent les leçons de l’édition birmane(marammapotthaka).
Les variantes signalées en notes par les éditeurs de la Pali Text Society ne sont pas reproduites. La pagination de l’édition de la Pali Text Society est donnée dans le texte entre crochets.
La transcription en caractères latins est l’œuvre de MM. Au Chhieng et Thach X’uong auxquels nous adressons tous nos remerciements. M. Au Chhieng a bien voulu, en outre, nous interpréter certains passages importants de la version cambodgienne publiée en regard du texte.
Les répétitions ont été respectées aussi bien dans la traduction que dans le texte lui-même. Il a paru nécessaire de se conformer à l’usage des religieux bouddhistes en les maintenant tout autant qu’ils les ont maintenues
eux-mêmes. La fidélité à la structure des textes était à ce prix, car elles sont un aspect caractéristique de cette structure en même temps que de la récitation des textes sacrés.
Le premier fascicule ici présenté contient les trois premiers textes (sutta) du Recueil des textes longs (Dïghanikaya) de la Corbeille des
textes (Suttapitaka) traduits par L. Renou.
Les notes seront réunies à la fin du tome I.
ANALYSE DU BRAHMAJALA
Tandis que le Buddha voyageait entre Râjagaha et Nâlandâ avec ses moines et que l’ascète Suppiya le suivait avec son jeune disciple Brahmadatta, Suppiya faisait la critique de la doctrine bouddhique, et Brahmadatta en faisait l’éloge. Le Buddha déclare alors que les gens du commun le louent pour des choses sans importance, à savoir pour s’abstenir de certaines pratiques défectueuses auxquelles se livrent maints religieux et brâhmanes. Mais il y a des choses importantes : ce sont celles pour lesquelles le Buddha veut être loué.
Soit d’abord les spéculations sur les origines: certains religieux et brâhmanes sont partisans de l’éternité du Soi et du monde, sous quatre formes. Le Tathâgata, lui, n’attache de prix qu’à la science de la Délivrance. Certains soutiennent en partie l’éternité (par ex. pour le brahman), en partie la non-éternité (par ex. pour les âmes), sous quatre formes. Certains soutiennent que l’univers est fini, ou infini, ou l’un et l’autre à la fois, ou ni l’un ni l’autre, sous quatre formes. Certains éludent toute réponse précise, sous quatre formes. Certains soutiennent qu’il n’y a pas de causalité, sous deux formes. Chaque fois le Tathagâta proclame qu’il n’attache de prix qu’à la Délivrance. Résumé de ces dix-huit formes.
En second lieu, les spéculations sur l’avenir : certains croient que le Soi après la mort jouit d’une existence consciente, sous seize formes. Certains, qu’il jouit d’une existence sans conscience, sous huit formes. Certains, qu’il jouit d’une existence qui n’est ni consciente, ni inconsciente, sous huit formes. Certains croient à un anéantissement, sous sept formes. Certains, à une Délivrance qui serait acquise dès ce monde-ci, sous cinq formes (parmi lesquelles figurent les quatre stades du jhâna). Chaque fois le Tathagâta proclame qu’il n’attache de prix qu’à la Délivrance. Résumé de ces quarante-quatre formes.
Résumé général des soixante-deux formes des opinions décrites.
Réfutation de ces opinions : ce sont croyances de gens aveugles, excités, qui se laissent guider par leur soif de l’être.
Nouvelle réfutation : ces théories représentent des jugements fondés sur le contact entre les objets extérieurs et les facultés.
Image du filet : les tenants de ces doctrines sont enfermés dans un filet comme les poissons pris par le pêcheur. Le Tathâgata a brisé la voie qui conduit à l’être.
Épilogue : le Bienheureux donne son nom au présent sermon.
I. Le filet de Brahman (Brahmajalasuttam pathamam)
1. Voici ce que j’ai entendu. Une fois le Bienheureux faisait route sur le parcours entre Hâjagaha et Nâlandà, avec une grande troupe de moines, cinq cents moines. Et Suppiya l’ascète itinérant faisait route, lui aussi, entre Rajagaha et Nâlandà, avec son disciple le jeune Brahmadatta. Or là, Suppiya l’ascète itinérant blâmait de plus d’une manière le Buddha, il blâmait la Loi, il blâmait la Communauté, cependant que le disciple de Suppiya l’ascète itinérant, le jeune Brahmadatta, louait de plus d’une manière le Buddha, louait la Loi, louait la Communauté. C’est ainsi qu’eux deux, le maître et le disciple, soutenant des thèses directement opposées l’une à l’autre, s’attachaient pas à pas au Bienheureux et à la troupe de moines.
Là-dessus le Bienheureux arriva dans la demeure royale à Ambalatthikâ afin d’y passer une nuit, avec la troupe de moines. Et Suppiya l’ascète itinérant arriva lui aussi dans la demeure royale à Ambalatthikâ afin d’y passer une nuit, avec son disciple le jeune Brahmadatta. Or là, de nouveau, Suppiya l’ascète itinérant blâmait de plus d’une manière le Buddha, il blâmait la Loi, il blâmait la Communauté, cependant que le disciple de Suppiya l’ascète itinérant, le jeune Brahmadatta, louait de plus d’une manière le Buddha, louait la Loi, louait la Communauté. C’est ainsi qu’eux deux, le maitre et le disciple, soutenant des thèses directement opposées l’une à l’autre, s’attachaient pas à pas au Bienheureux et à la troupe de moines.
La nuit une fois écoulée, la conversation suivante eut lieu entre un nombre de moines qui s’étant levés à l’aube se trouvaient réunis,
assemblés dans la même rotonde : « C’est prodigieux, mes frères, c’est extraordinaire, mes frères, comme le Bienheureux, lui qui sait,
qui voit, qui est un saint, parfaitement et entièrement éveillé, a bien compris les diverses inclinations des êtres. Voici en effet que Suppiya l’ascète itinérant blâme de plus d’une manière le Buddha, blâme la Loi, blâme la Communauté, cependant que le disciple de Suppiya l’ascète itinérant, le jeune Brahmadatta, loue de plus d’une manière le Buddha, loue la Loi, loue la Communauté. C’est ainsi qu’eux deux, le maître et le disciple, soutenant des thèses directement opposées l’une à l’autre, s’attachent pas à pas au Bienheureux et à la troupe de moines ».
Là-dessus le Bienheureux, qui avait eu l’intuition de cette conversation entre les moines, se rendit à la rotonde ; quand il s’y fut rendu, il s’assit à la place qui lui était assignée. Quand il se fut assis, le Bienheureux s’adressa aux moines : « Quel est le discours, moines, qui vous tient maintenant réunis assemblés, ou plutôt à quel moment votre discours vient-il de s’interrompre ? » Cela dit, les moines dirent au Bienheureux : « Seigneur, la nuit une fois écoulée, la conversation suivante eut lieu entre nous qui, levés à l’aube, nous trouvions réunis, assemblés dans la même rotonde : C’est prodigieux, mes frères, c’est extraordinaire, mes frères, comme le Bienheureux, lui qui sait, qui voit, qui est un saint, parfaitement et entièrement éveillé, a bien compris les di verses inclinations des êtres. Voici en effet que Suppiya l’ascète itinérant blâme de plus d’une manière le Buddha, blâme la Loi, blâme la Communauté, cependant que le disciple de Suppiya l’ascète itinérant, le jeune Brahmadatta, loue de plus d’une manière le Buddha, loue la Loi, loue la Communauté. C’est ainsi
qu’eux deux, le maître et le disciple, soutenant des thèses directement opposées l’une à l’autre, s’attachent pas à pas au Bienheureux et à la troupe de moines. – Voilà, Maître, le moment auquel notre discours a été interrompu quand le Bienheureux s’est approché. »
– « Moines, si d’autres gens me blâment, moi, ou blâment la Loi, ou blâment la Communauté, vous ne devez en concevoir ni colère, ni tourment, ni déplaisir de l’esprit. Car si vous êtes irrités ou chagrinés, moines, quand d’autres gens me blâment, moi, ou blâment la Loi, ou blâment la Communauté, il en résultera pour vous-mêmes un obstacle. Si vous êtes irrités ou chagrinés, moines, quand d’autres gens me blâment, moi, ou blâment la Loi, ou blâment la Communauté, pourrez-vous discerner chez ces autres gens ce qu’ils disent de juste, ce qu’ils disent d’injuste ? »
– « Ce n’est pas possible, Maître ».
– « Moines, si d’autres gens me blâment, moi, ou blâment la Loi, ou blâment la Communauté, vous devrez démêler comme faux ce qui est faux, et dire : pour telle raison ceci est faux, pour telle raison ceci est irréel, ceci n’existe pas chez nous, non, ceci ne se produit pas chez nous. »
« Moines, si d’autres gens me louent, moi, ou louent la Loi, ou louent la Communauté, vous ne devez en concevoir ni joie, ni contentement, ni exaltation de l’esprit. Car si vous êtes joyeux, contents ou exaltés, moines, quand d’autres gens me louent, moi, ou louent la Loi, ou louent la Communauté, il en résultera pour vous-mêmes un obstacle. Moines, si d’autres gens me louent, moi, ou louent la Loi, ou louent la Communauté, vous devrez reconnaître comme vrai ce qui est vrai, et dire : pour telle raison ceci est vrai, pour telle raison ceci est réel, ceci existe chez nous, oui, ceci se produit chez nous. »
2. « Insignifiant, moines, en vérité, minime, d’ordre purement moral, est ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. Et quelle est donc, moines, cette chose insignifiante, minime, d’ordre purement moral, qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata ? »
3. « Il évite de détruire les êtres vivants, il s’abstient de détruire les êtres vivants, le religieux Gotama : il a déposé le bâton, il a déposé l’épée ; il est modeste, compatissant ; il vit dans le souci de faire du bien à tous les êtres doués de vie. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
« Il évite de prendre ce qu’on ne lui donne pas, il s’abstient de prendre ce qu’on ne lui donne pas, le religieux Gotama : il ne prend pas ce qu’on lui donne, il ne tient qu’à ce qu’on lui donne ; il vit avec une âme purifiée, ignorant le vol. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
« Il évite l’incontinence, il est continent, le religieux Gotama : il se tient à l’écart, s’abstenant de la copulation, qui est la loi de la masse.
Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata, »
4. « Il évite la parole mensongère, il s’abstient de la parole mensongère, le religieux Gotama : il dit la vérité, fait un pacte avec la vérité;
il est sûr, digne de foi, ne trahissant pas sa parole envers les gens. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
« Il évite la parole calomnieuse, il s’abstient de la parole calomnieuse, le religieux Gotama: quand il a entendu quelque chose ici, il ne le
raconte pas là-bas, pour séparer ceux-là de ceux-ci; quand il a entendu quelque chose là-bas, il ne le raconte pas ici, pour séparer ceux-ci de ceux-là. Si les gens ont été ainsi divisés, il rétablit l’union; s’ils sont unis, il assure la continuité; il se plaît en l’harmonie, il a son plaisir en l’harmonie, il a sa joie en l’harmonie, il dit les mots qui créent l’harmonie. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
« Il évite la parole grossière, il s’abstient de la parole grossière, le religieux Gotama : la parole pure, agréable à l’oreille, aimable, allant
au coeur, civile, chère à maintes gens, plaisante à maintes gens, telle est la parole qu’il dit. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata, »
« Il évite le bavardage vide, il s’abstient du bavardage vide, le religieux Gotama : il parle en temps voulu, parle de ce qui est, parle de ce qui a un sens, parle de la Loi, parle de la Discipline; il dit des mots formant un trésor, opportuns, munis de raison, bien circonscrits, accompagnés d’un sens. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
5. « Il s’abstient d’endommager les graines et plantes de toute espèce, le religieux Gotama. Voilà, moines, etc. »
6. « Il fait un seul repas, le religieux Gotama, il jeûne le soir, il s’abstient de manger hors du temps. Il s’abstient des spectacles mauvais, danse, chant, musique, le religieux Gotama. Il s’abstient de porter des ornements et des parures, de mettre des guirlandes, des parfums, des onguents, le religieux Gotama. Il s’abstient des lits élevés, des grands lits, le religieux Gotama. Il s’abstient d’accepter de l’or ou de l’argent, le religieux Gotama. »
7. Il s’abstient d’accepter des grains crus, le religieux Gotama. Il s’abstient d’accepter de la viande crue, le religieux Gotama. Il s’abstient d’accepter des femmes et des jeunes filles, le religieux Gotama. Il s’abstient d’accepter des esclaves mâles et femelles, le religieux Gotama. Il s’abstient d’accepter des chèvres et des brebis, le religieux Gotama. Il s’abstient d’accepter des coqs et des porcs, le religieux Gotama. Il s’abstient d’accepter des éléphants, des boeufs, des chevaux et des juments, le religieux Gotama. Il s’abstient d’accepter des terres et des immeubles, le religieux Gotama. »
8. « Il s’abstient d’envoyer des messages ou d’aller soi-même, le religieux Gotama. Il s’abstient de l’achat el de la vente, le religieux Gotama. Il s’abstient de la tromperie en poids, de la tromperie en monnaie, de la tromperie en mesure, le religieux Gotama. Il s’abstient des offices fourbes, de la corruption, de la ruse, de la fraude, le religieux Gotama. Il s’abstient des blessures, meurtres, incarcérations, brigandages, pillages, actes de violence, le religieux Gotama. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata ».
|| Fin du petit cours de morale. ||
9. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, s’occupent ainsi à endommager les graines et plantes de toute espèce, – à savoir les graines nées d’une racine, les graines nées d’une branche, les graines nées d’un nœud, les graines nées d’une greffe, et en cinquième lieu les graines nées d’une graine – le religieux Gotama, lui, s’abstient d’endommager ainsi les graines et plantes de toute espèce. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
10. « S’il est vrai que certains religieux: et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, s’occupent ainsi à faire des réserves et à en jouir – à savoir réserves de nourriture, réserves de boisson, réserves de vêtements, réserves de véhicules,. réserves de lits, réserves d’onguents, réserves de parfums, réserves de friandises – le religieux Gotama, lui, s’abstient de faire ainsi des réserves et d’en jouir. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
11. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion; s’occupent ainsi à . des spectacles mauvais – à savoir danse, chant, musique, théâtre, récitation, claquement des mains, magie, trombone, ville des Gandharva, jonglerie, jeu du bambou, lavage des ossements, combat d’éléphants, combat de chevaux, combat de buffles, combat de taureaux, combat de boucs, combat de béliers, combat de coqs, combat de cailles, combat au bâton, combat au poing, boxe, lutte, avant-garde, armée déployée, revue de troupes – le religieux Gotama, lui, s’abstient de tels mauvais spectacles, Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata, »
12. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, s’occupent ainsi à des occupations consistant en jeux et frivolités – à savoir huit carrés, dix carrés, jeu de plein air, jeu où l’on évite les lignes, jeu de présence, dés, bâtonnets, main et pinceau, boules, panqaara, charrue, saut périlleux, moulin à vent, mesures en feuilles de palmier, chariot, petit arc, jeu de lettres, jeu de pensée, imitation des défauts physiques – le religieux Gotama, lui, s’abstient de telles occupations consistant en jeux et frivolités. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
13. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, s’occupent ainsi à des lits élevés, à de grands lits – à savoir fauteuils, divans, tapis de haute laine, courte-pointes, couvertures de laine, couvertures brodées de fleurs, matelas de coton, couvertures à broderies d’animaux, couvertures avec poil au-dessus ou avec poil d’un seul côté, couvertures de soie brodée de joyaux, soieries, tapis pour danseuses, couvertures d’éléphants, couvertures de chevaux, couvertures de voitures, housses en peau, belles couvertures en poil d’antilope kadalî, avec baldaquins et coussins rouges des deux côtés – le religieux Gotama, lui, s’abstient de lits élevés, de grands lits de cette sorte. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata, »
14. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, s’occupent ainsi à des occupations consistant en ornements et parures – à savoir onguents, massages, bains, frictions, miroirs, pommades, guirlandes et cosmétique, poudres détersives pour le visage, fard pour le visage, bracelets, chignons, cannes, boîtes, épées, parasols, sandales aux couleurs vives, turbans, joyaux, éventails en crins de buffle, vêtements blancs à longues franges – le religieux Gotama, lui, s’abstient de telles occupations consistant en ornements et parures. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata, »
15. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, s’occupent ainsi à des discours vulgaires – à savoir discours sur les rois, discours sur les voleurs, discours sur les ministres, discours sur l’armée, discours sur les périls, discours sur les batailles, discours sur la nourriture, discours sur la boisson, discours sur les vêtements, discours sur les lits, discours sur les guirlandes, discours sur les parfums, discours sur les parents, discours sur les véhicules, discours sur les bourgades, discours sur les marchés, discours sur les villes, discours sur les campagnes, discours sur les femmes, discours sur les hommes, discours sur les héros, discours sur les routes, discours sur les points d’eau, discours sur les gens antérieurement morts, discours sur des sujets divers, relatif aux choses de la nature, relatif à l’océan, discours sur ce qui est et n’est pas – le religieux Gotama, lui, s’abstient de tels discours vulgaires. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
16. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, s’occupent ainsi à des discours chicaniers – à savoir : toi tu ne connais pas cette discipline de la Loi, moi je connais cette discipline de la Loi, comment connaîtrais-tu cette discipline de la Loi ? – Tu t’es engagé dans la mauvaise voie, moi je me suis engagé dans la voie correcte. – Je suis conséquent avec moi-même, tu es inconséquent. – Tu as dit après ce qu’il fallait dire avant, tu as dit avant ce qu’il fallait dire après. – Ce que tu as imaginé est jeté bas. – Ta thèse est réfutée ; tu es battu. – Va te défaire de cette opinion-ci, ou démolis celle-là, si tu en es capable -, le religieux Gotama, lui, s’abstient de tels discours chicaniers. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
17. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, s’occupent ainsi à des occupations consistant à envoyer des messages ou à aller soi-même à savoir pour les rois, pour les hauts fonctionnaires du roi, pour les nobles, pour les brâhmanes, pour les bourgeois, pour les jeunes gens, en disant: va ici, va là-bas, emporte ceci là-bas, apporte-le ici – le religieux Gotama, lui, s’abstient de telles occupations consistant à envoyer des messages ou à aller soi-même. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
18. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, deviennent fraudeurs, hâbleurs, devins, jongleurs, cherchant à gagner profit sur profit le religieux Gotama, lui, s’abstient de telles fraudes et hâbleries. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
Il FIN DU COURS MOYEN DE MORALE. Il
19. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, assurent ainsi leur subsistance par des arts vulgaires, par une mauvaise façon de vivre – à savoir par les signes du corps) les omina, les portenta, les rêves, les marques, les déchirures causées par les rats, les oblations dans le feu, les oblations à la cuiller, les oblations à la paille, les oblations à la poudre de riz, les oblations aux grains de riz, les oblations au beurre, les oblations à l’huile, les oblations de bouche, les oblations au sang, la science du corps, la science des lieux à bâtir, la science des lieux à cultiver, la science des propitiations, la science des démons, la science magique, la science des serpents, la science des poisons, la science des scorpions, la science des rats, la science des oiseaux, la science des corneilles, la prédiction du temps à vivre, la protection contre les flèches, le règne animale religieux Gotama, lui, s’abstient de tels arts vulgaires, de telle mauvaise façon de vivre. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
20. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, assurent ainsi leur subsistance par des arts vulgaires, par une mauvaise façon de vivre – à savoir par les signes des joyaux, les signes des bâtons, les signes des vêtements, les signes des couteaux, les signes des épées, les signes des dards, les signes des arcs, les signes des armes en général, les signes des femmes, les signes des hommes, les signes des garçons, les signes des filles, les signes des esclaves mâles, les signes des esclaves femelles, les signes des éléphants, les signes des chevaux, les signes des buffles, les signes des taureaux, les signes des bœufs, les signes des chèvres ; les signes des béliers, les signes des coqs, les signes des cailles, les signes
des varans, les signes des bêtes à longues oreilles, les signes des tortues, les signes des bêtes sauvages – le religieux Gotama, lui, s’abstient de tels arts vulgaires, de telle mauvaise façon de vivre. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
21. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, assurent ainsi
leur subsistance par des arts vulgaires, par une mauvaise façon de vivre à savoir en disant: les rois feront une sortie, les rois ne feront pas de sortie ; les rois indigènes feront une avance, les rois étrangers feront une retraite ; les rois étrangers feront une avance, les rois indigènes feront une retraite ; les rois indigènes auront la victoire, les rois étrangers auront la défaite ; les rois étrangers auront la victoire, les rois indigènes auront la défaite ; c’est ainsi qu’un tel aura la victoire, qu’un tel aura la défaite – le religieux Gotama, lui, s’abstient de tels arts vulgaires, de telle mauvaise façon de vivre. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
22. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, assurent ainsi leur subsistance par des arts vulgaires, par une mauvaise façon de vivre à savoir en disant : il y aura une éclipse de lune ; il y aura une éclipse de soleil ; il y aura une éclipse de constellation ; la lune et le soleil suivront leur chemin ; la lune et le soleil quitteront leur chemin ; les constellations suivront leur chemin ; les constellations quitteront leur chemin ; il y aura chute de météores ; il y aura embrasement des orients; il y aura tremblement de terre ; il y aura grondement céleste ; la lune, le soleil, les constellations monteront, descendront, seront brouillés, seront purs ; voilà quelle sera la conséquence de l’éclipse de lune ; quelle sera la conséquence de l’éclipse de soleil ; quelle sera la conséquence de l’éclipse de constellation ; quelle sera la conséquence du fait que la lune et le soleil suivent leur chemin ; quelle sera la conséquence du fait que la lune et le soleil quittent leur chemin ; quelle sera la conséquence du fait que les constellations
suivent leur chemin ; quelle sera la conséquence du fait que les constellations quittent leur chemin ; quelle sera la conséquence de la
chute de météores ; quelle sera la conséquence de l’embrasement des orients ; quelle sera la conséquence du tremblement de terre ; quelle sera la conséquence du grondement céleste ; quelle sera la conséquence du fait que la lune, le soleil, les constellations montent, descendent, sont brouillés, sont purs – le religieux Gotama, lui, s’abstient de tels arts , vulgaires, de telle mauvaise façon de vivre. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
23. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, assurent ainsi leur subsistance par des arts vulgaires, par une mauvaise façon de vivre – à savoir en disant: il y aura une pluie abondante, il n’y aura point de pluie ; il y aura une riche moisson, il y aura la disette ; il y aura la paix, il y aura péril de guerre ; il y aura la maladie, il y aura la santé ; ou encore les gestes, l’arithmétique, le calcul improvisé, la poésie, les choses de la nature – le religieux Gotama, lui, s’abstient de tels arts vulgaires, de telle mauvaise façon de vivre. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
24. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, assurent ainsi leur subsistance par des arts vulgaires, par une mauvaise façon de vivre – à savoir par l’art de marier, de réconcilier, de désunir, de faire rentrer de l’argent, de faire prêter de l’argent, de rendre heureux, de rendre malheureux, de faire avorter, de paralyser la langue, de bloquer les mâchoires, de conjurer les mains, de conjurer les oreilles, d’interroger le miroir, d’interroger les filles, d’interroger les dieux, d’adorer le Soleil, d’adorer le Grand, de souffler le feu, d’invoquer la Fortune – le religieux Gotama, lui, s’abstient de tels arts vulgaires, de telle mauvaise façon de vivre. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
25. « S’il est vrai que certains religieux et brâhmanes, après avoir mangé les aliments qui leur sont donnés par religion, assurent ainsi leur subsistance par des arts vulgaires, par une mauvaise façon de vivre – à savoir par les pratiques magiques en vue d’apaiser les esprits, de se libérer de promesses faites, de se protéger, de garder sa maison, de donner la virilité, d’ôter la virilité, de déterminer les lieux à bâtir, de consacrer les lieux à bâtir, de rincer la bouche, de baigner, de faire des oblations, de faire vomir, de faire purger, de chasser les impuretés par le haut, de les chasser par le bas, de chasser celles qui sont dans la tête, de préparer de l’huile pour l’oreille, des lavages d’yeux, des drogues à respirer par le nez, des collyres, des onguents, d’exercer l’ophtalmologie, la chirurgie, la pédiâtrie, d’appliquer de nouveaux remèdes consistant en racines, de contre-carrer l’effet de médicaments – le religieux Gotama, lui, s’abstient de tels arts vulgaires, de telle mauvaise façon de vivre. Voilà, moines, ce qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
« Telle est, moines, la chose insignifiante, minime, d’ordre purement moral, qu’énonce l’homme du commun quand il prononce l’éloge du Tathâgata. »
Il FlN DU GRAND COURS DE MORALE. Il
26. « Mais il est, moines, d’autres sujets qui sont profonds, difficiles à voir, difficiles à saisir, sereins, élevés, inaccessibles au raisonnement, subtils, compréhensibles aux seuls sages ; le Tathâgata les communique quand il se les est représentés par sa connaissance supérieure ; c’est pour eux qu’on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au
réel. – Quels sont, moines, ces sujets profonds, difficiles à voir, difficiles à saisir, sereins, élevés, inaccessibles au raisonnement, subtils,
compréhensibles aux seuls sages ; ceux que le Tathâgata communique quand il se les est représentés par sa connaissance supérieure, et pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel ? »
27. « Moines, il y a certains religieux et brâhmanes traitant des premiers âges, spéculant sur les premiers âges, qui énoncent relativement aux premiers âges des dogmes qu’ils posent de façon diverse, sous dix-huit formes. Ces religieux et brâhmanes, quels sont les arguments, les points de vue grâce auxquels, traitant des premiers âges, spéculant sur les premiers âges, ils énoncent relativement aux premiers âges des dogmes qu’ils posent de façon diverse. sous dix-huit formes ? »
« Moines, il y a certains religieux et brâhmanes, soutenant l’éternité, qui proclament que le Soi et le monde sont éternels, cela sous quatre formes. Ces religieux et brâhmanes, quels sont les arguments, les points de vue grâce auxquels, soutenant l’éternité, ils proclament que le Soi et le monde sont éternels, cela sous quatre formes ? »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane, grâce à son ardeur, grâce à son énergie, grâce à son application, grâce à sa vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, atteigne une telle absorption de pensée que, sa pensée une fois absorbée (toute pure, toute nettoyée, sans tache, exempte d’impuretés), il se souvient de ses diverses résidences dans la vie antérieure – à savoir une existence, deux existences, trois existences, quatre existences, cinq existences, dix existences, vingt existences, trente existences, quarante existences, cinquante existences, cent existences, mille existences, cent mille existences, plusieurs centaines d’existences, plusieurs milliers d’existences, plusieurs centaines de milliers d’existences, eu sorte qu’il dira: en ce temps-là j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Quand je perdis cette existence-là,
j’accédai à cette autre. Là encore j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Quand je perdis cette existence-là, je parvins à mon existence actuelle. – C’est ainsi qu’il se souvient de ses diverses résidences dans la vie antérieure, avec leurs traits, avec le délai! des faits. Alors il dit : le Soi et le monde sont éternels, stériles, debout comme un pic, ils se tiennent stables comme un pilier ; tandis que les êtres courent çà et là, transmigrent, perdent une existence, accèdent à une autre, eux demeurent tels qu’ils étaient pour l’éternité des ans. »
« Quelle en est la cause? C’est que moi, grâce à mon ardeur, grâce à mon énergie, grâce à mon application, grâce à ma vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, j’ai atteint une telle absorption de pensée que, ma pensée une fois absorbée, je me souviens de mes diverses résidences dans la vie antérieure – à savoir une existence, deux existences, trois existences, quatre existences, cinq existences, dix existences, vingt existences, trente existences, quarante existences, cinquante existences, cent existences, mille existences, cent mille existences, plusieurs centaines d’existences, plusieurs milliers d’existences, plusieurs centaines de milliers d’existences, en sorte que je dirai: en ce temps-là j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Quand je perdis cette existence-là, j’accédai à cette autre. Là encore j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Quand je perdis cette existence-là, je parvins à mon existence actuelle. – C’est ainsi que je me souviens de mes diverses résidences dans la vie antérieure, avec leurs traits, avec le détail des faits, Je sais par suite. que le Soi et le monde sont éternels, stériles, debout comme tin pic, qu’ils se tiennent stables comme un pilier ; tandis que les êtres courent çà et là, transmigrent, perdent une existence, accèdent à une autre, eux demeurent tels qu’ils étaient pour l’éternité des ans. »
« Voilà, moines, en premier lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant l’éternité, proclament que le Soi et le monde sont éternels. »
28. « Et quels sont en second lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, soutenant l’éternité, proclament que le Soi et le monde sont éternels ? »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane, grâce à son ardeur, grâce à son énergie, grâce à son application, grâce à sa vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, atteigne une telle absorption de pensée que, sa pensée une fois absorbée, il se souvient de ses diverses résidences dans la vie antérieure – à savoir durant une évolution du monde, deux évolutions, trois évolutions, quatre évolutions, cinq évolutions, dix évolutions, en sorte qu’il dira: en ce temps-là j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Quand je perdis cette existence-là, j’accédai à cette autre. Là encore j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Quand je perdis cette existence-là, je parvins à mon existence actuelle. – C’est ainsi qu’il se souvient de ses diverses résidences dans la vie antérieure, avec leurs traits, avec le détail des faits. Alors il dit : le Soi et le monde sont éternels, stériles, debout comme un pic, ils se tiennent stables comme un pilier ; tandis que les êtres courent çà et là, transmigrent, perdent une existence, accèdent à une autre, eux demeurent tels qu’ils étaient pour l’éternité des ans. »
« Quelle en est la cause? C’est que moi, grâce à mon ardeur, grâce à mon énergie, grâce à mon application, grâce à ma vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, j’ai atteint une telle absorption de pensée que, ma pensée une fois absorbée, je me souviens de mes diverses résidences dans la vie antérieure – à savoir durant une évolution du monde, deux évolutions, trois évolutions, quatre évolutions, cinq évolutions, dix évolutions, en sorte que je dirai: en ce temps-là j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Quand je perdis cette existence-là, j’accédai à cette autre. Là encore j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Quand je perdis cette existence-là, je parvins à mon existence actuelle. – C’est ainsi que je me souviens de mes diverses résidences dans la vie
antérieure, avec leurs traits, avec le détail des faits. Je sais par suite que le Soi et le monde sont éternels, stériles, debout comme un pic, qu’ils se tiennent stables comme un pilier ; tandis que les êtres courent çà et là, transmigrent, perdent une existence, accèdent à une autre, eux demeurent tels qu’ils étaient pour l’éternité des ans. »
« Voilà, moines, en second lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant l’éternité, proclament que le Soi et le monde sont éternels. »
29. « Et quels sont en troisième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, soutenant l’éternité, proclament que le Soi et le monde sont éternels ? »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane, grâce à son ardeur, grâce à son énergie, grâce à son application, grâce à sa vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, atteigne une telle absorption de pensée que, sa pensée une fois absorbée, il se souvient de ses diverses résidences dans la vie antérieure – à savoir durant dix évolutions du monde, vingt évolutions, trente évolutions, quarante évolutions, en sorte qu’il dira: en ce temps-là j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Quand je perdis cette existence-là, j’accédai à cette autre. Là encore j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Quand je perdis cette existence-là, je parvins à mon existence actuelle. – C’est ainsi qu’il se souvient de ses diverses résidences dans la vie antérieure, avec leurs traits, avec le détail des faits. Alors il dit : le Soi et le monde sont éternels, stériles, debout comme un pic, ils se tiennent stables comme un pilier ; tandis que les êtres courent çà et là, transmigrent, perdent une existence, accèdent à une autre, eux demeurent tels qu’ils étaient pour l’éternité des ans. »
« Quelle en est la cause ? C’est que moi, grâce à mon ardeur, grâce à mon énergie, grâce à mon application, grâce à ma vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, j’ai atteint une telle absorption de pensée que, ma pensée une fois absorbée, je me souviens de mes diverses résidences dans la vie antérieure – à savoir durant dix évolutions du monde, vingt évolutions, trente évolutions, quarante évolutions, en sorte que je dirai : en ce temps-là j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Quand je perdis cette existence-là, j’accédai à cette autre. Là encore j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Quand je perdis cette existence-là, je parvins à mon existence actuelle. – C’est ainsi que je me souviens de mes diverses résidences dans la vie antérieure, avec leurs traits, avec le détail des faits. Et je sais par suite que le Soi et le monde sont éternels, .stériles, debout comme un pic, qu’ils se tiennent stables comme un pilier ; tandis que les êtres courent çà et là, transmigrent, perdent une existence, accèdent à une autre, eux demeurent tels qu’ils étaient pour l’éternité des ans. »
« Voilà, moines, en troisième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant l’éternité, proclament que le Soi et le monde sont éternels. »
30. « Et quels sont en quatrième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, soutenant l’éternité, proclament que le Soi et le monde sont éternels ? »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane use de raisonnement, de réflexion. Par l’effet de sa propre intuition martelée par le raisonnement, secondée par la réflexion, il dit ceci : le Soi et le monde sont éternels, stériles, debout comme un pic, ils se tiennent stables comme un pilier ; tandis que les êtres courent çà et là, transmigrent, perdent une existence, accèdent à une autre, eux demeurent tels qu’ils étaient pour l’éternité des ans. »
« Voilà, moines, en quatrième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant l’éternité, proclament que le Soi et le monde sont éternels. »
« Telles sont, moines, les quatre formes sous lesquelles religieux et brâhmanes, soutenant l’éternité, proclament que le Soi et le monde sont éternels. Les religieux ou les brâhmanes, moines, soutenant l’éternité, qui proclament que le Soi et le monde sont éternels, tous tant qu’ils sont le font sous ces quatre seules formes ou bien sous l’une d’entre elles, il n’y en a point en dehors de celles-là. »
« Or, moines, le Tathagâta sait ceci: ces points de doctrine, ainsi saisis, ainsi traités, ont telle ou telle issue, comportent tel ou tel destin. Voilà ce que sait le Tathâgata, et il sait davantage encore ; mais il ne traite pas de ce savoir, et n’en traitant pas il connait par lui-même la paix. Après qu’il a reconnu adéquatement la production et la disparition des perceptions, leur saveur et feurs méfaits et le moyen d’y échapper, il est inconditionnellement libéré, moines, le Tathâgata. »
« Tels sont, moines, les sujets profonds, difficiles à voir, difficiles à saisir, sereins, élevés, inaccessibles au raisonnement, subtils, compréhensibles aux seuls sages ; ceux que le Tathâgata communique quand il se les est représentés par sa connaissance supérieure, et pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
Il FIN DE LA PREMIÈRE LEÇON. Il
31. « Il y a, moines, certains religieux et brâhmanes, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité, qui proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels, cela sous quatre formes. Ces religieux et brâhmanes, quels sont les arguments, les points de vue grâce auxquels, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité, ils proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels, cela sous quatre formes ? »
« Il vient un moment, moines, où quelque jour, quand une longue période s’est écoulée, ce monde involue. Le monde involuant, les êtres parviennent généralement à l’état d’éléments Radieux. En cet état ils sont tout spirituels, nourris de joie, lumineux par eux-mêmes, ils se meuvent dans l’espace aérien et, résidant dans la gloire, ils durent une longue, une grande période. »
« Il vient un moment, moines, où, quelque jour, quand une longue période s’est écoulée, ce monde évolue. Le monde évoluant, le palais
vide de Brahman se manifeste. Alors un être qui a perdu la troupe des Radieux parce que son temps de vie est épuisé ou que ses mérites sont épuisés renaît dans le palais vide de Brahman. En cet état lui aussi est tout spirituel, nourri de joie, lumineux par soi-même, il se meut dans l’espace aérien et, résidant dans la gloire, il dure une longue, une grande période. »
« Quand il y est demeuré seul un long temps, il est mal à l’aise, il s’y déplaît, il conçoit du tourment: ah, si d’autres êtres pouvaient accéder à cette même condition 1 Alors d’autres êtres qui ont perdu la troupe des Radieux parce que leur temps de vie est épuisé ou que leurs mérites sont épuisés renaissent dans le palais de Brahman pour servir de compagnons à cet être. En cet état eux : aussi sont tout spirituels, nourris de joie, lumineux par eux-mêmes, ils se meuvent dans l’espace aérien et, résidant dans la gloire, ils durent une longue, une grande période. »
« Alors, moines, l’être qui était né le premier se dit: c’est moi qui suis Brahman, le grand Brahman, le dominateur que nul ne domine,
celui dont l’œil est infaillible, le tout-puissant, le seigneur, le créateur, le fabricateur, l’artisan éminent du destin, l’autonome, le père de ce qui fut et de ce qui sera. C’est moi qui ai fabriqué ces êtres. Pour quelle raison il C’est que je me suis dit autrefois: ah, si d’autres êtres pouvaient accéder à cette même condition! Tel fut le vœu de mon esprit, et voici que les êtres sont venus. Quant aux êtres qui naquirent ultérieurement, eux aussi se dirent : voici donc le vénérable Brahman, le grand Brahman, le dominateur que nul ne domine, celui dont l’œil est infaillible, le toutpuissant, le seigneur, le créateur, le fabricateur, l’artisan éminent du destin, l’autonome, le père de ce qui fut et de ce qui sera. C’est lui, le vénérable Brahman, qui nous a fabriqués. Pour quelle raison ? C’est que nous l’avons vu naître ici le premier ; nous autres sommes nés ultérieurement. »
« Cet être, moines, qui était né le premier dans ces conditions, il était doué de plus longue vie, plus beau et de plus grand pouvoir, tandis que les êtres qui naquirent ultérieurement furent doués d’une moins longue vie, plus laids et de moindre pouvoir. Or il peut se faire, moines, qu’un être quelconque perde son groupe et accède à l’ici-bas. Accédant à l’ici-bas, il quitte sa famille, passant de la maison à l’état sans maison. Quand il a quitté sa famille, passant de la maison à l’état sans maison, grâce à son ardeur, grâce à son énergie, grâce à son application, grâce à sa vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, il atteint une telle absorption de pensée que, sa pensée une fois absorbée ; il se souvient de ses diverses résidences dans la vie antérieure, mais il ne se souvient de rien au delà. Il se dit alors: le vénérable Brahman, le grand Brahman, le dominateur que nul ne domine, celui dont l’œil est infaillible, le tout- puissant, le seigneur, le créateur, le fabricateur, l’artisan éminent du destin, l’autonome, le père de ce qui fut et de ce qui Sera, le vénérable Brahman qui nous a fabriqués, il est permanent, stable, éternel, non soumis à changement, il demeurera le même pour
l’éternité des ans. Tandis que nous, qui avons été fabriqués par le vénérable Brahman, c’est impermanents, instables, de courte durée, soumis à perdre l’existence, que nous avons accédé à l’ici-bas. »
« Voilà, moines, en premier lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité, proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels. »
32. « Et quels sont en second lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité, proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels ? »
« Il y a, moines, des dieux qu’on nomme Corrompus-par-l’amusement. Ils passent un temps excessif à se soumettre à la loi du rire, de
l’amusement, de la volupté. Comme ils passent un temps excessif à se soumettre à la loi du rire, de l’amusement, de la volupté, leur mémoire se trouble, et leur mémoire se troublant ces dieux perdent leur groupe. »
« Or il peut se faire, moines, qu’un être quelconque perde son groupe et accède à l’ici-bas. Accédant à l’ici-bas, il quitte sa famille, passant de la maison à l’état sans maison. Quand il a quitté sa famille, passant de la maison à l’état sans maison, grâce à son ardeur, grâce à son énergie, grâce à son application, grâce à sa vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, il atteint une telle absorption de pensée que, sa pensée une fois absorbée, il se souvient de ses diverses résidences dans la vie antérieure, mais il ne se souvient de rien au delà. Il se dit alors : les vénérables dieux, qui ne sont point des Corrompus-par-l’amusement, ne passent pas un temps excessif à se soumettre à la loi du rire, de l’amusement, de la volupté. Comme ils ne passent pas un temps excessif à se soumettre à la loi du rire, de l’amusement, de la volupté, leur mémoire ne se trouble pas, et leur mémoire ne se troublant pas ces dieux ne perdent pas leur groupe. Permanents, stables, éternels, non soumis li changement, ils demeureront les mêmes pour l’éternité des ans. Tandis. que nous, les Corrompus-par-l’amusement, nous avons passé un temps excessif à nous soumettre à la loi du rire, de l’amusement, de la volupté. Comme nous avons passé un temps excessif à nous soumettre à la loi du rire, de l’amusement, de la volupté, notre mémoire s’est
troublée. Notre mémoire s’étant troublée nous avons perdu notre groupe : c’est impermanents, instables, de courte durée, soumis à perdre l’existence que nous avons accédé à l’ici-bas. »
« Voilà, moines, en second lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité, proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels. »
33. « Et quels sont en troisième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, soutenant d’une part I’éternité, d’autre part la non-éternité, proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels ? »
« Il y a, moines, des dieux qu’on nomme Corrompus-par-l’esprit. Ils s’observent les uns les autres un temps excessif. Comme ils s’observent les uns les autres un temps excessif, leurs pensées se corrompent les unes par les autres. Leurs pensées se corrompant les unes par les autres, leurs corps s’épuisent, leurs pensées s’épuisent. Ces dieux perdent leur groupe. »
« Or il peut se faire, moines, qu’un être quelconque perde son groupe et accède il l’ici-bas. Accédant à l’ici-bas, il quitte sa famille,
passant de la maison il l’état sans maison. Quand il a quitté sa famille, passant de la maison à l’état sans maison, grâce à son ardeur, grâce à son énergie, grâce à son application, grâce à sa vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, il atteint une telle absorption de pensée que, sa pensée une fois absorbée, il se souvient de ses diverses résidences dans la vie antérieure, mais il ne se souvient de rien au delà. Il se dit alors : les vénérables dieux, qui ne sont point des Corrompus-par-l’esprit, ne passent pas un temps excessif à s’observer les uns les autres. Comme ils ne passent pas un temps excessif à s’observer les uns les autres, leurs pensées ne se corrompent pas les unes par les autres. Leurs pensées ne se corrompant pas l’une l’autre, leurs corps ne s’épuisent pas, leurs
pensées ne s’épuisent pas. Ces dieux ne perdent pas leur groupe. Permanents, stables, éternels, non soumis à changement, ils demeureront les mêmes pour l’éternité des ans. Tandis que nous, les Corrompus-par-l’esprit, nous avons passé un temps excessif à nous observer les uns les autres. Comme nous avons passé un temps excessif à nous observer les uns les autres, nos pensées se sont corrompues les unes pal’ les autres. Nos pensées s’étant corrompues l’une l’autre, nos corps se sont épuisés, nos pensées se sont épuisées. Ainsi nous avons perdu notre groupe : c’est impermanents, instables, de courte durée, soumis à perdre, l’existence,
que nous avons accédé à l’ici-bas. »
« Voilà, moines, en troisième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité, proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels. »
34. « Et quels sont en quatrième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité, proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels. »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane use de raisonnement, de réflexion. Par l’effet de sa propre intuition martelée par le raisonnement, secondée par la réflexion, il dit ceci : ce qu’on appelle œil ou bien oreille ou bien nez ou bien langue ou bien corps, c’est le Soi : il est impermanent, instable, non éternel, soumis à changement. Et ce qu’on appelle esprit ou pensée ou conscience, c’est le Soi: il est permanent, stable, éternel, non soumis à changement, il demeurera le même pour l’éternité des ans. »
« Voilà, moines, en quatrième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité, proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels. »
« Telles sont, moines, les quatre formes sous lesquelles religieux et brâhmanes, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité, proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels. Les religieux ou les brâhmanes, moines, qui, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-étenité, proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels, tous tant qu’ils sont le font sous ces quatre seules formes ou bien sous l’une d’entre elles, il n’yen a point en dehors de celles-là. »
« Or, moines, le Tathâgata sait ceci: ces points de doctrine ainsi saisis, ainsi traités, ont telle issue, comportent tel ou tel destin. Voilà ce que sait le Tathâgata, et il sait davantage encore ; mais il ne traite pas de ce savoir, et n’en traitant pas il connaît par lui-même la paix.
Après qu’il a reconnu adéquatement la production et la disparition des perceptions, leur saveur et leurs méfaits et le moyen d’y échapper, il est inconditionnellement libéré, moines, le Tathâgata. »
« Tels sont, moines, les sujets profonds, difficiles à voir, difficiles à saisir, sereins, élevés, inaccessibles au raisonnement, subtils, compréhensibles aux seuls sages ; ceux que le Tathâgata communique quand il se les est représentés par sa connaissance supérieure, et pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
35. « Il y a, moines, certains religieux ou brâhmanes, soutenant le fini ou l’infini, qui proclament que le monde est fini ou infini, cela sous quatre formes. Ces religieux et brâhmanes, quels sont les arguments, les points de vue grâce auxquels, soutenant le fini ou l’infini, ils. proclament que le monde est fini ou bien infini, sous quatre formes ? »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane, grâce à son ardeur, grâce à son énergie, grâce à son application, grâce à sa vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, atteigne une telle absorption de pensée que, sa pensée une fois absorbée, il vit dans le monde avec la conscience que le monde est fini. Il dit ceci : ce monde est fini, il a une périphérie. Voilà, moines, en premier lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant le fini ou l’infini, proclament que le monde est fini ou infini. »
36. « Et quels sont en second lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, soutenant le fini ou l’infini,
proclament que le monde est fini ou infini ? »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane, grâce à son ardeur , grâce à son énergie, grâce à son application, grâce à sa vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, atteigne une telle absorption de pensée gue, sa pensée une fois absorbée, il vit dans le monde avec la conscience que le monde est infini. Il dit ceci : ce monde est infini, il est sans limites. Les religieux et brâhmanes qui disent que le monde est fini, qu’il a une périphérie, ils sont dans l’erreur. Ce monde est infini, il est sans limites. Pour quelle raison? Moi-même en effet, grâce à mon ardeur, grâce à mon énergie, grâce à mon application, grâce à ma vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, j’ai atteint une telle absorption de pensée que, ma pensée une fois absorbée, je vis dans le monde avec la conscience que le monde est infini. Par suite je sais que ce monde est infini, qu’il est sans limites. Voilà, moines, en second lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant le fini ou l’infini, proclament que le monde est fini ou infini. »
37. « Et quels sont en troisième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, soutenant le fini ou l’infini, proclament que le monde est fini ou infini ? »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane, grâce à son ardeur, grâce il son énergie, grâce à son application, grâce à sa
vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, atteigne une telle absorption de pensée que, sa pensée une fois absorbée, il vit dans le
monde avec la conscience que le monde est fini en haut et en bas, avec la conscience qu’il est infini en travers. Il dit ceci : ce monde est fini et il est infini. Les religieux et brâhmanes qui disent que ce monde est fini, qu’il a une périphérie, ils sont dans l’erreur. Et les religieux et brâhmanes qui disent que ce monde est infini, qu’il est sans limites, ils sont aussi dans l’erreur. Ce monde est fini et il est infini. Pour quelle raison ? Moi-même en effet, grâce il mon ardeur, grâce à mon énergie, grâce à mon application, grâce à ma vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, j’ai atteint une telle absorption de pensée que, ma pensée une fois absorbée ; je vis dans le monde avec la conscience que le monde est fini en haut et en bas, avec la conscience qu’il est infini en travers. Par suite je sais que ce monde est fini et qu’il est infini. Voilà, moines, en troisième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant le fini ou l’infini, proclament que le monde est fini ou infini. »
38. « Et quels sont en quatrième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, soutenant’ le fini ou l’infini, proclament que le monde est fini ou infini ? »
« II arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane use de raisonnement, use de réflexion. Par l’effet de sa propre intuition martelée par le raisonnement, secondée par la réflexion, il dit ceci : ce monde n’est pas fini, il n’est pas davantage infini. Les religieux et
brâhmanes qui disent que ce monde est fini, qu’il a une périphérie, ils sont dans l’erreur. Et les religieux et brâhmanes qui disent que ce
monde est infini, qu’il est sans limites, ils sont aussi dans l’erreur. Et les religieux et brâhmanes qui disent que ce monde est fini et qu’il est infini, ils sont aussi dans l’erreur. Ce monde n’est pas fini, il n’est pas davantage infini. Voilà, moines, en quatrième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant le fini ou l’infini, proclament que le monde est fini ou infini. »
« Telles sont, moines, les quatre formel ; sous lesquelles religieux et brâhmanes, soutenant le fini ou l’infini, proclament que le monde est fini ou infini. Les religieux ou les brâhmanes, moines, qui, soutenant le fini ou l’infini, proclament que le monde est fini ou infini, tous tant qu’ils sont le font sous ces quatre seules formes ou bien sous l’une d’entre elles, il n’yen a point en dehors de celles-là. »
« Or, moines, le Tathâgata sait ceci: ces points de doctrine ainsi saisis, ainsi traités, ont telle issue, comportent tel ou tel destin. Voilà ce que sait le Tathâgata, ct il sait davantage encore ; mais il ne traite pas de ce savoir, et n’en traitant pas il connaît par lui-même la paix. Après qu’il a reconnu adéquatement la production et la disparition des perceptions, leur saveur et leurs méfaits cL le moyen d’y échapper, il est inconditionnellement libéré, moines, le Tathâgata. »
« Tels sont, moines, les sujets profonds, difficiles à voir, difficiles à saisir, sereins, élevés, inaccessibles au raisonnement, subtils, compréhensibles aux seuls sages ; ceux que le Tathâgata communique quand il se les est représentés par sa connaissance supérieure, et pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
39. « Il y a, moines, certains religieux et brâhmanes, pratiquant l’art d’esquiver, tels des anguilles ; quelque question qu’on leur pose, ils
fournissent des mots qui esquivent, ils esquivent tels des anguilles, cela sous quatre formes. Ces religieux et brâhmanes, quels sont les arguments, les points de vue grâce auxquels, pratiquant l’art d’esquiver tels des anguilles, quelque question qu’on leur pose, ils fournissent des mots qui esquivent, ils esquivent tels des anguilles, cela sous quatre formes ? »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane ne discerne pas adéquatement si telle chose est bonne, qu’il ne discerne pas adéquatement si telle chose est mauvaise. Il se dit: je ne discerne pas adéquatement si telle chose est bonne, je ne discerne pas adéquatement si telle chose est mauvaise. Et comme je ne discerne pas adéquatement si telle chose est bonne, et que je ne discerne pas adéquatement si telle chose est mauvaise, si je voulais déclarer que telle chose est bonne, si je voulais déclarer que telle chose est mauvaise, j’y mettrais soit de la complaisance ou de la passion, soit de la haine ou de la répulsion. Y mettant soit de la complaisance ou de la passion, soit de la haine ou de la répulsion, je serais dans l’erreur. Étant dans l’erreur, il s’ensuivrait pour moi de J’affliction. Cette affliction qui s’ensuivrait pour moi serait pour moi un obstacle. Ainsi, par crainte d’une opinion erronée, par dégoût d’une opinion erronée, il s’abstient de déclarer que telle chose est bonne, il s’abstient de déclarer que telle chose est mauvaise. Quelque question qu’on lui pose il ce sujet, il fournit des mots qui esquivent, qui esquivent tels des anguilles: je ne pense pas ainsi ; je ne dis pas davantage oui ; je ne dis pas davantage qu’il en est autrement ; ni qu’il n’en est pas ainsi ; ni qu’il n’est pas vrai qu’il n’en soit pas ainsi. »
« Voilà, moines, en premier lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, pratiquant l’art d’esquiver, tels des anguilles, quelque question qu’on leur pose, fournissent des mots qui esquivent, ils esquivent tels des anguilles. »
40. « Et quels sont en second lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, pratiquant l’art d’esquiver,
quelque question qu’on leur pose, fournissent des mots qui esquivent, esquivent tels des anguilles ? »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane ne discerne pas adéquatement si telle chose est bonne, qu’il ne discerne pas adéquatement si telle chose est mauvaise. Il se dit: je ne discerne pas adéquatement si telle chose est bonne, je ne discerne pas adéquatement si telle chose est mauvaise. Et comme je ne discerne pas adéquatement si telle chose est bonne, et que je ne discerne pas adéquatement si telle chose est mauvaise, si je voulais déclarer que telle chose est bonne, si je voulais déclarer que telle chose est mauvaise, j’y mettrais soit de la complaisance ou de la passion, soit de la haine ou de la répulsion. Y mettant soit de la complaisance ou de la passion, soit de la haine ou de la répulsion, je m’attacherais à cette existence. M’y attachant, il s’ensuivrait de l’affliction pour moi. Cette affliction qui s’ensuivrait pour moi serait pour moi un obstacle. Ainsi, par crainte de l’attachement, par dégoût
de l’attachement, il s’abstient de déclarer que telle chose est bonne, il s’abstient de déclarer que telle chose est mauvaise. Quelque question qu’on lui pose à ce sujet, il fournit des mots qui esquivent, qui esquivent tels des anguilles : je ne pense pas ainsi ; je ne dis pas davantage oui ; je ne dis pas davantage qu’il en est autrement ; ni qu’il n’en est pas ainsi ; ni qu’il n’est pas vrai qu’il n’en soit pas ainsi. »
« Voilà, moines, en second lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux ct brâhmanes, pratiquant l’art d’esquiver, tels des anguilles, quelque question qu’on leur pose, ils fournissent des mots qui esquivent, esquivent tels des anguilles. »
41. « Et quels sont en troisième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, pratiquant l’art d’esquiver,
quelque question qu’on leur pose, fournissent des mots qui esquivent, esquivent tels des anguilles ? »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane ne discerne pas adéquatement si telle chose est bonne, qu’il ne discerne pas adéquatement si telle chose est mauvaise. Il se dit: je ne discerne pas adéquatement si telle chose est bonne, je ne discerne pas adéquatement si telle chose est mauvaise. Et comme je ne discerne pas adéquatement si telle chose est bonne, et que je ne discerne pas adéquatement si telle chose est mauvaise, si je voulais déclarer que telle chose est bonne, si je voulais déclarer que telle chose est mauvaise – étant donné qu’il est des religieux et brâhmanes savants, subtils, adroits à la controverse, sachant couper les cheveux en quatre et qui vont brisant pour ainsi dire avec leur intelligence les vues de l’adversaire – ils voudront me mettre à l’épreuve, pénétrer mes raisons, disputer avec moi. S’ils veulent donc me mettre à l’épreuve, pénétrer mes raisons, disputer avec moi, je ne saurai les satisfaire. Ne sachant les satisfaire, il s’ensuivra de l’affliction pour moi. Cette affliction qui s’ensuivra pour moi sera pour moi un obstacle. Ainsi, par crainte de l’épreuve, par dégoût de l’épreuve, il s’abstient de déclarer que telle chose est bonne, il s’abstient de déclarer que telle chose est mauvaise. Quelque question qu’on lui pose à ce sujet, il fournit des mots qui esquivent, qui esquivent tels des anguilles : je ne
pense pas ainsi ; je ne dis pas davantage oui ; je ne dis pas davantage qu’il en est autrement ; ni qu’il n’en est pas ainsi ; ni qu’il n’est pas vrai qu’il n’en soit pas ainsi. »
« Voilà, moines, en troisième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, pratiquant l’art d’esquiver tels des anguilles, quelque question qu’on leur pose, fournissent des mots qui esquivent, esquivent tels des anguilles. »
42. « Et quels sont en quatrième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, pratiquant l’art d’esquiver tels des anguilles, quelque question qu’on leur pose, fournissent des mots qui esquivent, esquivent tels des anguilles ? »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane est lent d’esprit, stupide. Par suite de sa lenteur, de sa stupidité, quelque question qu’on lui pose, il fournit des mots qui esquivent, esquivent tels des anguilles: si tu me demandes: est-il un autre monde et si je crois qu’il est un autre monde, je te répondrai: il est un autre monde ; je ne pense pas ainsi ; je ne dis pas davantage oui; je ne dis pas davantage qu’il en est autrement; ni qu’il n’en est pas ainsi; ni qu’il n’est pas vrai qu’il n’en soit pas ainsi. – Si tu me demandes : n’est-il pas un autre monde ? Etc. Est-il et n’est-il pas un autre monde ? N’y a-t-il ni un autre monde ni absence d’autre monde ? Y a-t-il des êtres spontanés ? N’y a-t-il pas des êtres spontanés ? Y a-t-il et n’y a-t-il pas des êtres spontanés ? N’y a-t-il ni êtres spontanés ni absence de tels êtres ? Y a-t-il un fruit, un mûrissement pour les actes bons ou mauvais ? N’y a-t-il pas de fruit, de mûrissement pour les actes bons ou mauvais ? Y a-t-il et n’y a-t-il pas de fruit, de mûrissement pour les actes bons ou mauvais ? N’y a-t-il ni fruit et mûrissement, ni absence de fruit et mûrissement pour les actes bons ou mauvais? Le Tathâgata existe-t-il après la mort? Le Tathâgata n’existe-t-il pas après la mort? Le Tathâgata existe-t-il et n’existe-t-il pas après la mort? N’est-il ni existence ni non-existence du Tathâgata après la mort ? … si je crois que le Tathâgata n’existe pas après la mort et en même temps qu’il n’est pas vrai qu’il n’existe pas, je te répondrai : le Tathâgata n’existe pas après la mort et il n’est pas vrai qu’il n’existe pas je ne pense pas ainsi ; je ne dis pas davantage oui ; je ne dis pas davantage qu’il en est autrement ; ni qu’il n’en est pas ainsi ; ni qu’il n’est pas vrai qu’il n’en soit pas ainsi. »
« Voilà, moines, quels sont en quatrième lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, pratiquant l’art d’esquiver tels des anguilles, quelque question qu’on leur pose, fournissent des mots qui esquivent, esquivent tels des anguilles. »
« Telles sont, moines, les quatre formes sous lesquelles religieux et brâhmanes, pratiquant l’art d’esquiver tels des anguilles, quelque question qu’on leur pose, fournissent des mots qui esquivent, esquivent tels des anguilles. Les religieux ou les brâhmanes, moines.’ pratiquant l’art d’esquiver tels des anguilles, quelque question qu’on leur pose, qui fournissent des mots qui esquivent, esquivent tels des anguilles, tous tant qu’ils sont le font sous ces quatre seules formes ou bien sous l’une d’entre elles, il n’yen a point en dehors de celles-là. Etc. Ce sont les sujets pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
43. « Il y a, moines, certains religieux ou brâhmanes, soutenant la production sans cause, qui proclament que le Soi et le monde sont
produits sans cause, cela sous deux formes. Ces religieux et brâhmanes, quels sont les arguments, les points de vue grâce auxquels, soutenant la production sans cause, ils proclament que le Soi et le monde sont produits sans cause, cela sous deux formes ? »
« Il y a, moines, des dieux qu’on nomme les Êtres-sans-conscience : quand ils sont pourvus d’une conscience, ces dieux perdent leur groupe. Or il peut se faire, moines, qu’un être quelconque perde son groupe et accède à l’ici-bas. Accédant à l’ici-bas, il quitte sa famille, passant de la maison à l’état sans maison. Quand il a quitté sa famille, passant de la maison à l’état sans maison, grâce à son ardeur, grâce à son énergie, grâce à son application, grâce à sa vigilance, grâce à une parfaite attention d’esprit, il atteint une telle absorption de pensée que, sa pensée une fois absorbée, il se souvient de la production de sa conscience, et ne se souvient de rien au delà. Il se dit alors: le Soi et le monde sont produits sans cause. Quelle en est la raison ê C’est que moi-même autrefois je n’étais pas, je suis maintenant, moi qui n’étais pas, j’ai évolué à l’état d’être. »
« Voilà, moines, en premier lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels certains religieux et brâhmanes, soutenant la production sans cause, proclament que le Sai et le monde sont produits sans cause. »
44. « Et quels sont en second lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, soutenant la production sans cause, proclament que le Soi et le monde sont produits sans cause ? »
« II arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane use de raisonnement, de réflexion. Par l’effet de sa propre intuition martelée par
le raisonnement, secondée par la réflexion, il dit ceci : le Soi et le monde sont produits sans cause. Voilà, moines, en second lieu les arguments, les points de vue grâce auxquels religieux et brâhmanes, soutenant la production sans cause, proclament que le Soi et le monde sont produits sans cause. Telles sont les deux formes, moines, sous lesquelles les religieux ou les brâhmanes, soutenant la production sans cause, proclament que le Soi et le monde sont produits sans cause. Les religieux ou les brâhmanes, moines, soutenant la production sans cause, qui proclament que le Soi et le monde sont produits sans cause, tous tant qu’ils sont le font sous ces quatre seules formes ou bien sous l’une d’entre elles, il n’yen a point en dehors de celles-là. Etc. Ce sont les sujets pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
« Telles sont les dix-huit formes, moines, sous lesquelles les religieux ou les brâhmanes traitant des premiers âges, spéculant sur les premiers âges, énoncent relativement aux premiers âges des dogmes qu’ils posent de façon diverse. Les religieux ou les brâhmanes, moines, traitant des premiers âges, spéculant sur les premiers âges, qui énoncent relativement aux premiers âges des dogmes qu’ils posent de façon diverse, tous tant qu’ils sont le font sous ces dix-huit formes ou bien sous l’une d’entre elles, il n’y en a point en dehors de celles-là. »
« Or, moines, le Tathâgata sait ceci : ces points de doctrine, ainsi saisis, ainsi traités, ont telle ou telle issue, comportent tel ou tel destin. Voilà ce que sait le Tathâgata, et il sait davantage encore ; mais il ne traite pas de ce savoir, et n’en traitant pas il connaît par lui-même la paix. Après qu’il a reconnu adéquatement la production et la disparition des perceptions, leur saveur et leurs méfaits et le moyen d’y échapper, il est inconditionnellement libéré, moines, le Tathâgata. »
« Tels sont, moines, les sujets profonds, difficiles à voir, difficiles à saisir, sereins, élevés, inaccessibles au raisonnement, subtils, compréhensibles aux seuls sages; ceux que le Tathâgata communique quand il se les est représentés par sa connaissance supérieure, et pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
45. « Il y a, moines, certains religieux et brâhmanes, traitant des âges à venir, spéculant sur les âges à venir, qui énoncent relativement
aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, cela sous quarante-quatre formes. Ces religieux et brâhmanes, quels sont les arguments, les points de vue grâce auxquels, traitant des âges à venir, spéculant sur les âges à venir, ils énoncent relativement aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, sous quarante-quatre formes ? »
46. « Il y a, moines, certains religieux et brâhmanes, soutenant le Soi conscient après la destruction du corps, qui proclament qu’il y a après la destruction un Soi conscient, cela sous seize formes. Ces religieux et brâhmanes, quels sont les arguments, les points de vue grâce auxquels, soutenant le Soi conscient après la destruction, ils proclament qu’il y a après la destruction un Soi conscient, cela sous seize formes ? »
« Après la mort, proclament-ils, il y a un Soi conscient qui a forme, sans maladie ; après la mort, proclament-ils, il y a un Soi conscient
sans forme, sans maladie ; il y a un Soi ayant forme et sans forme ; il y a un Soi qui n’a ni forme ni absence de forme ; il y a un Soi fini ; il y a un Soi infini ; il il un Soi fini et infini ; il y a un Soi qui n’est ni fini ni infini ; il y a un Soi conscient de l’unicité ; il y a un Soi conscient de la diversité ; il y a un Soi conscient du limité ; il y a un Soi conscient du démesuré ; il Y a un Soi totalement heureux ; il y a un Soi totalement malheureux ; il y a un Soi heureux et malheureux ; il y a un Soi qui n’est ni malheureux ni heureux ; tel est après la mort le Soi conscient, sans maladie, qu’ils proclament. »
« Telles sont les seize formes, moines, sous lesquelles religieux et brâhmanes, soutenant le Soi conscient après la destruction du corps, proclament qu’il y a après la destruction un Soi conscient. Les religieux ou les brâhmanes, moines, soutenant le conscient après la destruction, qui proclament qu’il y a après la destruction un Soi conscient, tous tant qu’ils sont le font sous ces seize formes seules ou bien sous l’une d’entre elles ; il n’yen a point en dehors de celles-là. Etc. Ce sont les sujets pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
|| FIN DE LA DEUXIÈME LEÇON. ||
47. « Il y a, moines, certains religieux et brâhmanes, soutenant le Soi non conscient après la destruction du corps, qui proclament qu’il
y a après la destruction un Soi non conscient, cela sous huit formes. Ces religieux ct brâhmanes, quels sont les arguments, les points de vue grâce auxquels, soutenant le Soi conscient après la destruction, ils proclament qu’il y a après la destruction un Soi non conscient, cela sous huit formes ? »
« Après la mort, proclament-ils, il y a un Soi non conscient qui a forme, sans maladie; après la mort, proclament-ils, il y a un Soi
conscient sans forme, sans maladie; il y a un Soi ayant forme et sans forme, etc. ; il y a un Soi qui n’a ni forme ni absence de forme; il Y a un Soi fini ; il y a un Soi infini ; il y a un Soi ni fini ni infini : tel est après la mort le Soi non conscient, sans maladie, qu’ils proclament. »
« Telles sont, moines, les huit formes sous lesquelles religieux et brâhmanes, soutenant le Soi non conscient après la destruction du corps, proclament qu’il y a après la destruction un Soi non conscient. Les religieux ou les brâhmanes, moines, soutenant le Soi non conscient après la destruction du corps, qui proclament qu’il y a après la destruction un Soi non conscient, tous tant qu’ils sont le font sous ces huit seules formes ou bien sous l’une d’entre elles; il n’y en a point en dehors de celles-là. Etc. Ce sont Ies sujets pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
48. « Il y a, moines, certains religieux et brâhmanes, soutenant le Soi non conscient et non inconscient après la destruction du corps, qui proclament qu’il y a après la destruction un Soi ni conscient ni inconscient, cela sous huit formes. Ces religieux et brâhmanes, quels sont les arguments, les points de vue grâce auxquels, soutenant le Soi non conscient et non inconscient après la destruction du corps, ils proclament que le Soi n’est ni conscient ni inconscient après la destruction, cela sous huit formes ? »
« Après la mort, proclament-ils, il y a un Soi sans maladie, ni conscient, ni non conscient, ayant forme; il y a un Soi sans forme,
etc. ; il y a un Soi ayant forme et sans forme ; il y a un Soi qui n’a ni forme ni absence de forme; il y a un Soi fini; il y a un Soi infini ; il
y a un Soi fini et infini ; il y a un Soi qui n’est ni fini ni infini ; tel est après la mort le Soi sans maladie, ni conscient ni inconscient, qu’ils proclament. »
« Telles sont, moines, les huit formes sous lesquelles religieux et brâhmanes, soutenant le Soi non conscient et non inconscient après la destruction du corps, proclament qu’il y a après la destruction un Soi ni conscient ni inconscient, cela sous huit formes. Les religieux ou les brâhmanes, moines, soutenant le Soi non conscient et non inconscient après la destruction du corps, qui proclament que le Soi n’est ni conscient ni inconscient après la destruction du corps, tous tant qu’ils sont le font sous ces huit formes ou bien sous l’une d’entre elles; il n’y en a point en dehors de celles-là. Etc. Ce sont les sujets pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
49. « Il y a, moines, certains religieux et brâhmanes, soutenant la ruine de l’être, qui proclament la ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation, cela sous sept formes. Ces religieux’ et brâhmanes, quels sont les arguments, les points de vue grâce auxquels, soutenant la ruine, ils proclament la ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation, cela sous sept formes? »
« Il arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane soutient cette thèse, cette vue: quand ce Soi ayant ‘forme, fait des quatre grands éléments, issu du père et de la mère, est ruiné avec la brisure du corps, qu’il disparait, qu’il n’existe plus après la mort, c’est donc bien que ce Soi est réellement ruiné en sa totalité. Ainsi certains proclament-ils la ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation. »
« Un autre dit ceci: il existe en fait, ce Soi dont tu parles ; je dis qu’il n’est pas vrai qu’il n’existe pas ; mais il ne s’ensuit pas que ce Soi est réellement ruiné en sa totalité. Car il existe un autre Soi, divin, ayant forme, de la sphère des désirs, nourri d’aliments matériels. Celui-là, tu ne le connais pas, tu ne le vois pas. Moi je le connais, je le vois. Étant donné que ce Soi est ruiné avec la brisure du corps, qu’il disparaît, qu’il n’existe plus après la mort, c’est donc bien que ce Soi est réellement ruiné en sa totalité. Ainsi certains proclament-ils la ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation. »
« Un autre dit ceci : il existe en fait, ce Soi dont tu parles ; je dis qu’il n’est pas vrai qu’il n’existe pas ; mais il ne s’ensuit pas que ce Soi
est réellement ruiné en sa totalité. Car il existe un autre Soi, divin, ayant forme, spirituel, avec tous les organes et membres, ne manquant d’aucune faculté. Celui-là, tu ne le connais pas, toi, tu ne le vois pas ; moi je le connais, je le vois. Étant donné que ce Soi est ruiné avec la brisure du corps, qu’il disparaît, qu’il n’existe plus après la mort, c’est donc bien que ce Soi est réellement ruiné en sa totalité. Ainsi certains proclament-ils la ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation. »
« Un autre dit ceci : il existe en fait, ce Soi dont tu parles ; je dis qu’il n’est pas vrai qu’il n’existe pas; mais il ne s’ensuit pas que ce Soi
est réellement ruiné en sa totalité. Car il existe un autre Soi : après qu’a été franchie entièrement la conscience des formes, abolie la
conscience des réactions, arrachée de la pensée la conscience de la diversité, il accède au plan de l’infinité spatiale, se disant : l’espace est infini. Si tu ne le connais pas, toi, tu ne le vois pas, moi je le connais, je le vois. Étant donné que ce Soi est ruiné avec la brisure du corps, qu’il disparaît, qu’il n’existe plus après la mort, c’est donc bien que ce Soi est réellement ruiné en sa totalité. Ainsi certains proclament-ils la ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation. »
« Un autre dit ceci : il existe en fait, ce Soi dont tu parles ; je dis qu’il n’est pas vrai qu’il n’existe pas; mais il ne s’ensuit pas que ce Soi est réellement ruiné en sa totalité. Car il existe un autre Soi: après qu’a été franchi entièrement le plan de l’infinité spatiale, il accède au plan de l’infinité cognitive, se disant : la connaissance est infinie. Si tu ne le connais pas, toi, tu ne le vois pas, moi je le connais, je le vois. Étant donné que ce Soi est ruiné avec la brisure du corps, qu’il disparaît, qu’il n’existe plus après la mort, c’est donc bien que ce Soi est réellement ruiné en sa totalité. Ainsi certains proclament-ils lit. ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation. »
« Un autre dit ceci : il existe en fait, ce Soi dont tu parles ; je dis qu’il n’est pas vrai qu’il n’existe pas ; mais il ne s’ensuit pas que ce Soi est réellement ruiné en sa totalité. Car il existe un autre Soi : après qu’a été franchi entièrement le plan de l’infinité cognitive, il accède au plan de la non-existence-de-quoi-que-ce-soit, se disant: il n’existe quoi que ce soit. Si tu ne le connais pas, toi, tu ne le vois pas, moi je le connais, je le vois. Étant donné que ce Soi est ruiné avec la brisure du corps, qu’il disparaît, qu’il n’existe plus après la mort, c’est donc bien que ce Soi est réellement ruiné en sa totalité. Ainsi certains proclament-ils la ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation. »
« Un autre dit ceci : il existe en fait, ce Soi dont tu parles ; je dis qu’il n’est pas vrai qu’il n’existe pas ; mais il ne s’ensuit pas que ce Soi
est réellement détruit en sa totalité. Car il existe un autre Soi : après qu’a été franchi le plan de la non-existence-de-quoi-que-ce-soit, il
accède au plan de la non-conscience et de la non-inconscience, se disant : ici est la paix, ici l’excellence. Si tu ne le connais pas, toi, tu ne le vois pas, moi je le connais, je le vois. Étant donné que ce Soi est ruiné avec la brisure du corps, qu’il disparaît, qu’il n’existe plus après la mort, c’est donc bien que ce Soi est réellement ruiné en sa totalité. Ainsi certains proclament-ils la ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation. »
« Telles sont, moines, les sept formes sous lesquelles religieux et brâhmanes, soutenant la ruine, proclament la ruine de l’être existant,
sa disparition, sa cessation. Les religieux ou les brâhmanes, moines, soutenant la ruine, qui proclament la ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation, tous tant qu’ils sont le font sous ces sept formes. Etc. Ce sont les sujets pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
50. « II y a, moines, certains religieux et brâhmanes, soutenant la Délivrance dans le monde visible, qui proclament que l’être existant est définitivement .délivré dans le monde visible, cela sous cinq formes. Ces religieux et brâhmanes, quels sont les arguments, les points de vue grâce auxquels, soutenant la Délivrance dans le monde visible, ils proclament que l’être existant est définitivement délivré dans le monde visible, cela sous cinq formes ? »
« II arrive, moines, que tel ou tel religieux ou brâhmane, soutient cette thèse, cette vue: quand ce Soi, mis en possession du faisceau des cinq désirs, se les incorporant, s’y complaît, c’est donc bien que ce Soi accède à la Délivrance définitive dans le monde visible. Ainsi certains proclament-ils que l’être existant est définitivement délivré dans le monde visible. »
« Un autre dit ceci : il existe en fait, ce Soi dont tu parles ; je dis qu’il n’est pas vrai qu’il n’existe pas ; mais il ne s’ensuit pas que ce Soi
accède à la Délivrance définitive dans le monde visible. Pour quelle raison ? C’est que les désirs sont inconstants, douloureux, soumis à changement ; de leur passage à un autre état par changement viennent le chagrin, les lamentations, la souffrance, le malaise et l’inquiétude. Quand ce Soi s’est dissocié des désirs, s’est dissocié des notions mauvaises, quand il accède et demeure au premier stade de la méditation, comportant raisonnement et réflexion-décisive, né de la dissociation, consistant en bonheur avec allégresse, c’est que ce Soi est bien arrivé à la Délivrance définitive dans le monde visible. Ainsi certains proclament-ils que l’être existant est définitivement délivré dans le monde visible. »
« Un autre dit ceci: il existe en fait, ce Soi dont tu parles ; je dis qu’il n’est pas vrai qu’il n’existe pas ; mais il ne s’ensuit pas que ce Soi
accède à la. Délivrance définitive dans le monde visible. Pour quelle raison ? C’est que, comportant raisonnement et réflexion-décisive, on considère cet état comme grossier. Mais quand ce Soi, ayant mis fin au raisonnement ct à la réflexion-décisive, accède et demeure au second stade de la méditation, lequel, apaisement à l’intérieur et condensation de la pensée, exclut raisonnement et réflexion-décisive et qui, né de l’absorption, consiste en bonheur avec allégresse, c’est que ce Soi est bien arrivé à la Délivrance définitive dans le monde visible. Ainsi certains proclament-ils que l’être existant est définitivement délivré dans le monde visible. »
« Un autre dit ceci : il existe en fait, ce Soi dont tu parles ; je dis qu’il n’est pas vrai qu’il n’existe pas ; mais il ne s’ensuit pas que ce Soi
accède à la Délivrance définitive dans le monde visible. Pour quelle raison ? C’est que, comportant allégresse et excitation de l’esprit, on
considère cet état comme grossier. Mais quand ce Soi, se détournant de l’allégresse, vit indifférent, conscient et compréhensif, quand il ressent dans son corps le bonheur, en sorte que les Nobles l’appellent l’indifférent, le conscient, l’heureux à vivre, et qu’il accède ainsi et demeure au troisième stade de la méditation, c’est que ce Soi est bien arrivé à la Délivrance définitive dans le monde visible. Ainsi certains proclament-ils que l’être existant est définitivement délivré dans le monde visible. »
« Un autre dit ceci: il existe en fait, ce Soi dont tu parles; je dis qu’il n’est pas vrai qu’il n’existe pas ; mais il ne s’ensuit pas que ce Soi
accède à la Délivrance définitive dans le monde visible. Pour quelle raison ? C’est que, l’esprit jouissant du bonheur en cet état, on considère cet état comme grossier. Mais quand ce Soi s’est défait du bonheur et s’est défait de la souffrance, quand ont été abolis l’aide et le malaise antérieurs, qu’il y a absence de souffrance, absence de bonheur, pureté totale par l’indifférence et la conscience de soi, quand il accède ainsi et demeure au quatrième stade de la méditation, c’est que ce Soi est bien arrivé à la Délivrance définitive dans le monde visible. Ainsi certains proclament-ils que l’être existant est définitivement délivré dans le monde visible. »
« Telles sont les cinq formes, moines, sous lesquelles religieux et brâhmanes, soutenant la Délivrance dans le monde visible, proclament que l’être existant est définitivement délivré dans le monde visible. Les religieux ou les brâhmanes, moines, soutenant la Délivrance dans le monde visible, qui proclament que l’être existant est définitivement délivré dans le monde visible, tous tant qu’ils sont le font sous ces cinq formes, etc. Cc sont les sujets pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
« Telles sont les quarante-quatre formes, moines, sous lesquelles religieux et brâhmanes, traitant des âges à venir, spéculant sur les âges à venir, énoncent relativement aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse. Les religieux ou les brâhmanes, moines, traitant des âges à venir, spéculant sur les âges à venir, qui énoncent relativement aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, tous tant qu’ils sont le font sous ces quarante-quatre formes seules, etc. Ce sont les sujets pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
« Telles sont les soixante-deux formes, moines, sous lesquelles religieux et brâhmanes, traitant des premiers âges et traitant des âges à
venir et traitant à la fois des premiers âges et des âges à venir et spéculant sur les premiers âges et les âges à venir, énoncent relativement aux premiers âges et aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse. Les religieux ou les brâhmanes, moines, traitant des premiers âges ou traitant des âges à venir ou traitant à la fois des premiers âges et des âges à venir et spéculant sur les premiers âges et les âges à venir, qui énoncent relativement aux premiers âges et aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, tous tant qu’ils sont le font sous ces soixante-deux formes seules ou bien sous l’une d’entre elles ; il n’y en a point en dehors de celles-là. »
« Or, moines, le Tathâgata sait ceci: ces points de doctrine ainsi saisis, ainsi traités, ont telle ou telle issue, comportent tel ou tel destin. Voilà ce que sait le Tathâgata, et il sait davantage encore; mais il ne traite pas de ce savoir, et n’en traitant pas il connaît par lui-même la paix. Après qu’il a reconnu adéquatement la production ct la disparition des perceptions, leur saveur et leurs méfaits et le moyen d’y échapper, il est inconditionnellement libéré, moines, le Tathâgata. »
« Tels sont, moines, ces sujets profonds, difficiles à voir, difficiles à saisir, sereins, élevés, inaccessibles au raisonnement, subtils, compréhensibles aux seuls sages; ceux que le Tathâgata communique quand il se les est représentés par sa connaissance supérieure, et pour lesquels on peut à bon droit énoncer du Tathâgata un éloge conforme au réel. »
51. « Parmi ces religieux ct brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant l’éternité, proclament que le Soi et le monde sont éternels, cela sous quatre formes, c’est, chez ces religieux ct brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie à la soif de l’être. »
52. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité, proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels, cela sous quatre formes, c’est, chez ces religieux et brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie à la soif de l’être. »
53. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant le fini et l’infini, proclament que le monde est fini et infini, cela sous quatre formes, c’est, chez ces religieux et brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie à la soif de l’être. »
54. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, pratiquant l’art d’esquiver tels des anguilles, quelque question qu’on leur pose, fournissent des mots qui esquivent, esquivent tels des anguilles, cela sous quatre formes, c’est, chez ces religieux et brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie à la soif de l’être. »
55. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant Ia production sans cause, proclament que le Soi et le monde sont produits sans cause, cela sous deux formes, c’est, chez ces religieux et brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie à la soif de l’être. »
56. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, traitant des premiers âges, spéculant sur les premiers âges, énoncent relativement aux premiers âges des dogmes qu’ils posent de façon diverse, cela sous dix-huit formes, c’est, chez ces religieux et brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie à la soif de l’être. »
57. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant le Soi conscient après la destruction du corps, proclament qu’il y a après la destruction un Soi conscient, cela sous seize formes, c’est, chez ces religieux et brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie à la soif de l’être. »
58. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant le Soi non conscient après la destruction du corps, proclament qu’il y a après la destruction un Soi non conscient, cela sous huit formes, c’est, chez ces religieux et brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie à la soif de l’être. »
59. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant le Soi non conscient et non inconscient après la destruction du corps, proclament qu’il y a après la destruction un Soi ni conscient ni inconscient, cela sous huit formes, c’est, chez ces religieux et brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie à la soif de l’être. »
60. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant la ruine, proclament la ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation, cela sous sept formes, c’est, chez ces religieux et brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie il la soif de l’être. »
61. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant la Délivrance dans le monde visible, proclament que l’être existant est définitivement délivré dans le monde visible, cela sous cinq formes, c’est, chez ces religieux et brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie à la soif de l’être. »
62. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, traitant des âges à venir, spéculant sur les âges à venir, énoncent relativement aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, cela sous quarante-quatre formes, c’est, chez ces religieux et brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie à la soif de l’être. »
63. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, traitant des premiers âges ou traitant des âges à venir ou traitant à la fois des premiers âges et des âges à venir ou spéculant sur les premiers âges et les âges à venir, énoncent relativement aux premiers âges et aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, cela sous soixante-deux formes, c’est, chez ces religieux et brâhmanes, l’expérience de gens qui ne savent pas, qui ne voient pas, l’excitation et la contorsion de gens en proie à la soif de l’être. »
64. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant l’éternité, proclament que le Soi et le monde sont éternels, cela sous quatre formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
65. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité, proclament que le
Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels, cela sous quatre formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
66. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant le fini et l’infini, proclament que le monde est fini ou infini, cela sous quatre formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
67. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, pratiquant l’art d’esquiver tels des anguilles, quelque question qu’on leur pose, fournissent des mots qui esquivent, esquivent tels des anguilles, cela sous quatre formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
68. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant la production sans cause, proclament que lo Soi et le monde sont produits sans cause, cela sous deux formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
69. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, traitant des premiers âges, spéculant sur les premiers âges, énoncent relativement aux premiers âges des dogmes qu’ils posent de façon diverse, cela sous dix-huit formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
70. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant le Soi conscient après la destruction du corps, proclament qu’il y a après la destruction un Soi conscient, cela sous seize formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
71. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant le Soi non conscient après la destruction du corps, proclament qu’il y a après la destruction un Soi non conscient, cela sous huit formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
72. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant le Soi non conscient et non inconscient après la destruction du corps, proclament qu’il y a après la destruction un Soi non conscient ni inconscient, cela sous huit formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
73. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant la ruine, proclament la ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation, cela sous sept formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
74. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant la Délivrance dans le monde visible, proclament que l’être existant est définitivement délivré dans ]e monde visible, cela sous cinq formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
75. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, traitant des âges à venir, spéculant sur les âges à venir, énoncent relativement aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, cela sous quarante-quatre formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
76. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, traitant des premiers âges ou traitant des âges à venir ou traitant à la fois des premiers âges et des âges à venir ou spéculant sur les premiers âges et les âges à venir, énoncent relativement aux premiers âges et aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, cela sous soixante-deux formes, c’est par suite du contact avec les sens. »
77. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant l’éternité, proclament que le Soi et le monde sont éternels, cela sous quatre formes, il n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
78. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité, proclament que le Soi et le monde sont d’une part éternels, d’autre part non éternels, cela sous quatre formes, il n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
79. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant le fini et l’infini, proclament que le monde est fini ou infini, cela sous quatre formes, il n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
80. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, pratiquant l’art d’esquiver tels des anguilles, quelque question qu’on leur pose, fournissent des mots qui esquivent, esquivent tels des anguilles, cela sous quatre formes, il n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
81. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant la production sans cause, proclament que le Soi et le monde sont produits sans cause, cela sous deux formes, il n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
82. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, traitant des premiers âges, spéculant sur les premiers âges, énoncent relativement aux premiers âges des dogmes qu’ils posent de façon diverse, cela sous dix-huit formes, il n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
83. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant le Soi conscient après la destruction du corps, proclament qu’il y a après la destruction un Soi conscient, cela sous dix-huit formes, il n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
84. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant le Soi non conscient après la destruction du corps, proclament qu’il y a après la destruction un Soi non conscient, cela sous huit formes, il ‘n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
85. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant le Soi non conscient ni inconscient après la destruction du corps, proclament qu’il y a après la destruction un Soi ni conscient ni inconscient, cela sous huit formes, il n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
86. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant la ruine, proclament la ruine de l’être existant, sa disparition, sa cessation, cela sous sept formes, il n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
87. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant la Délivrance dans le monde visible, proclament que l’être existant est définitivement délivré dans le monde visible, cela sous cinq formes, il n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
88. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, traitant des âges à venir, spéculant sur les âges à venir, énoncent relativement aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, cela sous quarante-quatre formes, il n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
89. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, traitant des premiers âges ou traitant des âges à venir ou traitant à la fois des premiers âges et des âges à venir ou spéculant sur les premiers âges et les âges à venir, énoncent relativement aux premiers âges et aux tiges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, cela sous soixante-deux formes, il n’y a pas lieu d’admettre qu’ils puissent percevoir autrement que par le contact des sens. »
90. « Parmi ces religieux et brâhmanes, moines, ceux qui, soutenant l’éternité, proclament que le Soi et le monde sont éternels, cela sous quatre formes ; et les religieux et brâhmanes soutenant d’une part l’éternité, d’autre part la non-éternité ; et les religieux et brâhmanes soutenant le fini et l’infini ; et les religieux et brâhmanes pratiquant l’art d’esquiver tels des anguilles ; et les religieux et brâhmanes soutenant la production sans cause ; et les religieux et brâhmanes traitant des premiers âges ; et les religieux et brâhmanes soutenant le Soi conscient après la destruction du corps ; et les religieux et brâhmanes soutenant le Soi non conscient après la destruction du corps ; et les religieux et brâhmanes soutenant le Soi ni conscient ni inconscient après la destruction du corps ; et les religieux et brâhmanes soutenant la ruine ; et les religieux et brâhmanes soutenant la Délivrance dans le monde visible ; et les religieux et brâhmanes traitant des âges à venir ; et les religieux et brâhmanes, traitant des premiers âges ou traitant des âges à venir ou traitant à la fois des premiers âges et des âges à venir ou spéculant sur les premiers âges et les âges à venir, qui énoncent relativement aux premiers âges et aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, cela sous soixante-deux formes, tous tant qu’ils sont perçoivent par le contact séparé des six régions du contact des sens. Sur leur perception repose la soif de l’être, sur la soif de l’être repose l’attachement aux phénomènes, sur l’attachement repose l’existence, sur l’existence repose la naissance, sur la naissance reposent la vieillesse et la mort, d’où viennent le chagrin, les lamentations, la souffrance, le malaise et l’inquiétude. Mais si, ô moines, le moine a reconnu adéquatement la production ct la disparition des six régions du contact des sens, leur saveur et leurs méfaits et le moyen d’y échapper, il a une connaissance qui va bien au delà de toutes ces choses. »
« Les religieux ou les brâhmanes, moines, traitant des premiers âges ou traitant des âges à venir ou traitant à la fois des premiers âges et des âges à venir ou spéculant sur les premiers âges et les âges à venir, qui énoncent relativement aux premiers âges et aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, tous tant qu’ils sont le font sous ces soixante-deux formes seules: ils y sont pris à l’intérieur du filet ; quand ils font des sauts, ils font des sauts tout ligotés ; quand ils font des sauts, ils font des sauts tout enfermés, pris à l’intérieur du filet. »
« De même, moines, qu’un pêcheur habile ou un apprenti pêcheur recouvre un petit étang d’un filet aux mailles fines, se disant: les êtres vivants de quelque grosseur qui sont dans cet étang, tous sont pris à l’intérieur du filet ; quand ils font des sauts, ils font des sauts tout ligotés ; quand ils font des sauts, ils font des sauts tout enfermés, pris à l’intérieur du filet, – de même, moines, les religieux ou les brâhmanes, traitant des premiers âges ou traitant des âges à venir ou traitant à la fois des premiers âges et des âges à venir ou spéculant sur les premiers âges et sur les âges à venir, qui énoncent relativement aux premiers âges et aux âges à venir des dogmes qu’ils posent de façon diverse, tous tant qu’ils sont le font sous ces soixante-deux formes seules: ils y sont pris à l’intérieur du filet ; quand ils font des sauts, ils font des sauts tout ligotés ; quand ils font des sauts, ils font des sauts tout enfermés, pris
à l’intérieur du filet. »
« Le corps du Tathâgata, moines, a brisé ce qui conduit à l’existence. Tant que son corps durera, les dieux et les hommes le verront. A la brisure du corps, après la consommation de sa vie, les dieux et les hommes ne le verront plus. »
« De même, moines, que toutes les mangues attachées à une tige portant un groupe de mangues suivent le sort de cette tige si elle se rompt, – de même, moines, le corps du Tathâgata a brisé ce qui conduit à l’existence. Tant que son corps durera, les dieux et les
hommes le verront. A la brisure du corps, après la consommation de sa vie, les dieux et les hommes ne le verront plus. »
Il parla, et le vénérable Ananda dit au Bienheureux : « C’est prodigieux, Maître, c’est extraordinaire, Maître. Quel est le nom de cet exposé
de la Loi, seigneur ? »
– « Eh bien, Ânanda, cet exposé de la Loi, appelle-le le Filet des biens, appelle-le le filet de Brahman, appelle-le le filet des fausses doctrines, appelle-le l’incomparable victoire après le combat. »
Ainsi parla le Bienheureux. Les moines satisfaits saluèrent la parole du Bienheureux. Et tandis qu’était récitée cette prédication, le monde aux dix mille plans trembla.